Responsabilité pour faute en cas de rupture brutale des relations commerciales établies

En matière contractuelle, les parties sont libres de s’engager et à l’inverse de se délier de leurs engagements.

Un contrat peut être résilié sans motif, dès lors que les conditions fixées au contrat et les dispositions légales applicables sont respectées.

L’article L.442-6 du code de commerce sanctionne en revanche « la rupture abusive d’une relation commerciale établie », notamment lorsqu’elle est la conséquence d’une résiliation prononcée sans préavis.

Ce texte vie à instaurer un équilibre entre d’un côté le principe de la liberté contractuelle et de l’autre, les intérêts de l’entreprise lésée par le comportement de son cocontractant.

Un arrêt rendu par la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation permet d’illustrer comment les juges apprécient la faute du cocontractant indélicat. 

En l’espèce, une société avait confié à une seconde la distribution exclusive de produits de sa marque sur le sol italien.

Le contrat avait été conclu le 1er septembre 1998 pour une durée initiale de trois ans, renouvelable par tacite reconduction.

Faisant grief d’une mauvaise gestion des stocks, le contrat a été résilié par la première société par courrier du 29 mars 2013, avec prise d’effet au 31 août 2013.

La société distributrice a estimé que la résiliation avait été prononcée de manière fautive et réclamait en conséquence réparation de son préjudice, soit en l’espèce le coût de la valeur du stock à reprendre outre les frais de stockage.

Le cœur du débat portait sur l’appréciation du comportement de l'auteur de la rupture qui, en même temps qu’il invoquait une faute de son cocontractant (circonstance qui peut justifier une résiliation immédiate) avait accordé un préavis réduit, plus court que celui prévu au contrat.

La Cour d'appel de Paris avait considéré qu’aucune faute n’avait été commise par la société à l’initiative de la résiliation dans la mesure où le préavis accordé était suffisant, raisonnable, au regard de la gravité des fautes commises par la société distributrice.

Cet arrêt est cassé, la Cour de Cassation sanctionnant le raisonnement des juges d’appel qui auraient dû analyser le comportement de la société distributrice pour qualifier une faute avant de statuer sur l’opportunité d’accorder un préavis réduit.

L’intérêt de cette décision porte sur le fait que la Cour de Cassation semble admettre, malgré la cassation, qu’un préavis prévu dans un contrat puisse être réduit en présence d'une faute d’une certaine gravité imputable au cocontractant.

Elle rappelle en sus qu’un contrat ne peut être rompu sans préavis qu’en cas de faute grave commise par son cocontractant.

Com., 14 octobre 2020, n° 18-22.119